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YIDIA Vision

David Hume et sa théorie de la connaissance.

20 Juin 2019 , Rédigé par Yicirpè F. BAMOUNI Publié dans #Philosophie

 

Une des grandes figures de l’empirisme moderne, David Hume fit son entrée dans le cercle des philosophes avec son Traité de la nature humaine(1740) mais qui ne connut pas de succès. Non découragé de cette défaite et convaincu de ses idées, il mit au jour un nouvel ouvrage, Essai sur l’entendement humain(1748), objet de notre travail, dans lequel il reconstruit sa pensée et qui le mit au piédestal de la notoriété et de la célébrité. En effet dans cet ouvrage, Hume tente, après contact avec les œuvres de John Locke, de répondre à la question suivante : Quelle est l’origine de la connaissance ? Notre travail se veut être un partage sur ledit ouvrage, nous épargnant ainsi de toute prétention d’exhaustivité.

 

  Présentation de l’auteur.

 

Biographie.

David Hume est un philosophe, économiste, historien et diplomate né à Édimbourg(en Écosse) le 07 mai 1711. Originaire d'une famille de petite noblesse, il perd son père Joseph, avocat de métier à l’âge de 03 ans et vit dans une famille peu fortunée avec sa mère Katherine sous le contrôle rigide de son oncle pasteur calviniste. À l’âge de onze ans, David entre au Collège d’Édimbourg où il étudie la logique, la rhétorique, les mathématiques, mais surtout la “ philosophie naturelle ” qui lui donne l’occasion de prendre contact – fait déterminant pour sa carrière future – avec le système de Newton. Après des études brillantes, il se détourne du droit au profit des lettres classiques et de la philosophie. A l'âge de 23 ans, il part pour la France où il rédige son "Traité de la nature humaine" qui aura peu de succès. Son "Essai sur l'entendement humain" lui procure une certaine notoriété sur le continent. Après avoir été bibliothécaire à Edimbourg, il séjourne en France comme secrétaire de l’ambassadeur de Grande-Bretagne de 1763 à 1766 où il fréquente les salons parisiens et les encyclopédistes. Il se lie d'amitié notamment avec Jean-Jacques Rousseau, avec qui il se brouille rapidement. Il se retire dans son pays d'origine en 1769 et y meurt le 25 août 1776 à l’âge de 65 ans. Une foule immense assiste à son enterrement. L’un des assistants s’écrie : “ Ah ! C’était un athée ! – Aucune importance, rétorque son voisin, c’était un honnête homme. ”

Bibliographie[1]

David est auteur de plusieurs ouvrages dont ces quelques-uns que nous citons ici dans notre travail :

· Traité de la nature humaine, (A Treatise of Human Nature, 1739), trad. A. Leroy, AubierMontaigne, 1946.

· Lettre d'un gentilhomme à son ami d'Édimbourg, D. Deleule éd., fac. lettres, Besançon, 1976.

· Essais moraux, politiques et littéraires, Vrin, 1972.

· Essai sur l'entendement humain (1748), trad. Maxime David, Librairie Felix Alcan, 1912.

· Enquête sur les principes de la morale (1751), An Enquiry Concerning the Principles of Morale, 1751), A. Leroy, Aubier-Montaigne (1947), nouv. trad. P. Baranger et P. Saltel, Flammarion, 1991.

· Dialogues sur la religion naturelle (posthume 1779). (Dialogues Concerning Natural Religion), trad. M. David, Vrin, 1964.

· L'Histoire naturelle de la religion et autres essais sur la religion, trad. M. Malherbe, Vrin, 1972.

· Essais esthétiques, 2 vol., trad. M. Malherbe, Vrin, 1973.

· L'Homme et l'Expérience, D. Dreyfus et F. Klodoss, PUF, 1967.

 

 Présentation de l’œuvre.

 

Structure.

L’Essai sur l’entendement humain est l’ouvrage le plus lu de Hume. Celui qui est à notre portée est inclus dans les Œuvres Philosophique (Choisies et traduites de l’Anglais par Maxime David) de David Hume, publiées à Paris par la Librairie Félix Alcan, 1912. Cet ouvrage est souvent cité comme renfermant la quintessence de la philosophie de Hume. En effet, pour Hume, il n’y a pas de relation entre la raison critique et les questions pratiques qui relèvent en fait du sens commun : l'entendement qui permet à l'homme de survivre, de régler ses difficultés pratiques, de définir des vertus et vices socialement reconnus à partir d'impressions communes. La causalité n'a pas de fondement métaphysique. Elle n'est qu'une croyance nécessaire, basée sur la régularité de nos impressions. L’ouvrage de 180 pages est subdivisé en douze parties comme suit :

· Section I: Cette partie parle des différentes sortes de philosophie. Dans cette partie, Hume divise la philosophie morale qu’il appelle aussi science naturelle en deux : l’une considérant l’homme né pour l’action et l’autre qui considère l’homme comme un être raisonnable cherchant à former son entendement.

· Section II: Cette partie traite de l’origine des idées. Ici Hume divise les perceptions de l’esprit en deux : nous avons les perceptions les moins vivaces appelées pensées ou idées et les perceptions les plus vivaces appelées impressions.

· Section III: Ici, il est question de l’association des idées. Hume affirme qu’il y a une connexion entre les différentes pensées de l’esprit et cette connexion a trois principes : la relation de ressemblance, la relation de contiguïté et la relation de cause à effet.

· Section IV: Cette partie traite du doute sceptique sur les opérations de l’esprit. Ici Hume affirme que c’est l’expérience qui nous révèle les causes et les effets d’un objet. Sans le secours de l’observation et de l’expérience, l’on ne peut inférer une cause à un effet.

· Section V: Ici il est question des solutions sceptiques du doute sceptique. Il s’agit en effet de suspendre nos jugements, de voir le danger à décider sans précaution, de nous emprisonner dans les étroites limites de la recherche de notre entendement et de renoncer à toutes les spéculations qui ne restent pas dans les limites de la vie et de la pratique courante.

· Section VI : Dans cette partie Hume parle de la probabilité. Il dit en effet que l’ignorance de la cause d’un évènement ne doit pas nous conduire à la nommer hasard car le hasard n’existe pas. Tout est démonstration, preuves et probabilité.

· Section VII : Dans cette partie Hume parle d’une connexion nécessaire entre les idées. Il s’agit de ce qui fait que l’un est la conséquence infaillible de l’autre. Mais aucun résonnement humain ne peut déterminer ce pouvoir ; il nous est donné par le Créateur universel.

· Section VIII : Dans cette partie, Hume parle de la liberté et de la nécessité. Il dit en effet que la liberté est l’état de celui qui est ni dans les chaines ni en prison. Pour lui, la définition de la liberté doit tenir compte que cette définition soit en accord avec les choses de fait et en accord avec elle-même. La nécessité consiste soit dans la conjonction constante d’objets semblables, soit dans l’inférence de l’entendement, d’un objet à un  autre. De cette liberté et de cette nécessité, aucune action humaine n’est criminelle si l’on la remonte au Créateur. Si elle l’est, c’est que la divinité est criminelle et ne mérite aucun attribut de louange.

· Section  IX : Dans cette partie, Hume parle de la raison des animaux. Il nous fait savoir que les animaux comme les hommes apprennent par l’expérience et savent toujours que des mêmes évènements suivent toujours les mêmes causes. Mais les conclusions que les animaux tirent ne viennent pas d’un raisonnement. Ces conclusions viennent de l’accoutumance et de l’instinct qui est un don originel de la nature.

· Section X : Ici, il est question des miracles. Pour Hume, pour que quelque chose soit considéré comme miracle, il faut qu’il n’arrive jamais dans le cours habituel de la nature et que la fausseté du témoignage soit aussi établie que le fait du miracle qu’il témoigne. Hume note cependant que les miracles abondent chez les peuples barbares et non instruit car ces peuples dépourvus d’esprit critique prennent des histoires pour miracles et satisfont leurs croyance par l’émerveillement qu’il titre en racontant ces histoires.

· Section XI : Cette partie traite d’une providence divine et d’un état futur. Hume affirme en effet qu’il n’y a point de providence divine ni d’état futur car personne n’a jamais fait l’expérience des sphères célestes pour nous parler d’état futur.

· Section XII : Ici, il est question de la philosophie académique ou sceptique. Hume affirme que le scepticisme est une préparation nécessaire à la philosophie et qu’il ne faut pas se fier aux sens seuls. Cependant, note-t-il, le pyrrhonisme n’a aucun bénéfice pour la société. Il doit être corrigé par le sens commun ou la réflexion.

 

Résumé synthétique.

David Hume entame son travail par une énumération de deux manières de traiter la philosophie naturelle ou science morale.

En effet, une manière considère l’homme comme étant né pour l’action, mu par ses sentiments et poursuivant des objets telle la vertu. L’autre présente l’homme comme un être raisonnable cherchant à former son entendement et à cultiver ses mœurs. Il regarde la nature humaine comme objet de spéculation et cherche des principes fondant la morale : c’est la métaphysique. Cependant, les gens n’ont pas de préférence pour la métaphysique. Hume affirme que si l’esprit de la philosophie est bien cultivé, elle entachera positivement tous les domaines de la vie : « l’homme d’état saura diviser et équilibrer les pouvoirs avec plus de prévoyance et plus de finesse »[2]. Mais pour arriver à cela, il nous faut connaitre les opérations de l’esprit.

« Les opérations de l’esprit quoique présentes en nous de la façon la plus intime apparaissent enveloppé de ténèbres dès que nous nous en faisons l’objet de notre réflexion »[3]. Il nous faut donc avoir une haute clairvoyance et une habitude à la réflexion. Il faut connaitre les opérations de l’esprit, les mettre en ordre et les différencier. En ce sens, il nous faut connaitre l’origine des idées.

Il existe une différence entre les perceptions de l’esprit. Il y a les perceptions les moins fortes et moins vives appelées PENSEES ou IDEES et celles les plus fortes et plus vives appelées IMPRESSIONS (quand nous entendons, voyons, sentons, etc.). Pour les idées, Hume affirme que « rien, au premier aspect, ne peut sembler plus affranchi de toutes limites que la pensée de l’homme»[4]. Mais en l’examinant, nous trouvons qu’elle est resserrée et limitée et que le pouvoir de création de l’esprit n’est que la manipulation des matériaux que nous offrent les sens et l’expérience. Tous les matériaux de la pensée viennent des sens et « toutes nos idées c’est-à-dire nos perceptions les plus faibles sont les copies de nos impressions c’est-à-dire nos perceptions les plus vives »[5]. Mais  il y a un principe de connexion entre les différentes pensées ou idées de l’esprit et celles-ci s’introduisent à la mémoire et à l’imagination avec un certain degré de méthode et de régularité. De cette connexion émergent trois principes : « la ressemblance, la contiguïté dans le temps et l’espace et la causalité »[6].

Pour parvenir à l’étude de la nature de l’évidence que nous donne la certitude sur les faits, nous devons chercher comment nous parvenons à la connaissance de la cause et de l’effet. En fait, c’est l’expérience qui nous révèle les causes et les effets d’un objet et qui nous permet de tirer une inférence sur une existence réelle et une chose de fait. Tout effet est un évènement distinct de sa cause. Sans le secours de l’observation et de l’expérience, l’on ne peut inférer une cause ou un effet. Tous les arguments sur les choses existantes sont fondés sur la relation de cause à effet et notre connaissance de cette relation est dérivée de l’expérience. Toutes nos conclusions expérimentales procèdent de la supposition que le futur sera conforme au passé. Tous les arguments tirés de l’expérience se fondent sur la similitude. En ce sens, il faut avoir l’esprit du doute sceptique ou académique.

Pour le doute sceptique, il est question de doute et de suspension de jugements, de danger à décider hâtivement, d’emprisonnement dans d’étroites limites des recherches de l’entendement, et de renoncement à toutes spéculations qui ne restent pas dans les limites de la vie et de la pratique courante. Rien n’est plus libre que l’imagination car elle a le pouvoir illimité de mêler, de composer, de séparer et de diviser les idées dans toutes les variétés de de la fiction et de la vision. Mais il importe ici de différencier la fiction de la croyance. La croyance est ce qui est senti par l’esprit et qui distingue les idées du jugement des fonctions de l’imagination. De ce fait, « toutes les inférences tirées de l’expérience sont donc des effets de l’habitude, non du raisonnement »[7]. L’accoutumance est donc le grand guide de la vie. Aussi, l’ignorance de la cause d’un évènement ne doit pas nous conduire à la nommer hasard car le hasard n’existe pas. Nous devons plutôt raisonner en termes de démonstration, de preuves et de probabilité.

Hume montre également qu’il y’a un pouvoir, une connexion nécessaire qui lie l’effet à la cause et fait que l’un est la conséquence infaillible de l’autre. Il dit en effet que « toute idée est la copie de quelque impression ou de quelque sentiment précédent ; et là où nous ne pouvons trouver aucune impression, nous pouvons être certains qu’il n’y a point d’idée »[8]. Mais aucun raisonnement humain ne peut déterminer ce pouvoir de connexion. Nous l’obtenons par la révélation de la part du Créateur universel.

Pour Hume, liberté et nécessité vont de pair. Pour lui un homme libre est celui qui est libre de ses mouvements et la nécessite est cette relation constante de la cause et de l’effet. C’est là le fondement de la morale car de cette liberté et de cette nécessité, aucune action n’est mauvaise si l’on la remonte à la divinité. Si elles le sont, c’est que la divinité est criminelle. Hors notre société est pleine d’actes criminels. Pour cette raison, Hume affirme que la divinité est « l’auteur ultime de toutes nos volitions est le Créateur du monde »[9].

Abordant le miracle, Hume dit qu’« un miracle est une violation des lois de la nature »[10] et que c’est chez les peuples ignorant et non civilisés qu’abondent les miracles. Hume est tout à fait sceptique face au miracle. A la suite de ceci, il niera toute existence de providence divine et d’état futur. Ainsi prône-t-il le scepticisme académique pour accéder à la connaissance tout en rejetant le pyrrhonisme.

 

 

[1] Association ALDERAN, Conférence 4312 200-03 : ‘’David Hume et le scepticisme’’ 16/12/13, p.19.

[2] David Hume, Essai sur l’entendement humain, p.07

[3] Ibid., p.09

[4] Ibid., p.16

[5] Ibid., p.17

[6] Ibid., p.23

[7] David Hume, Essai sur l’entendement humain p.49

[8] Ibid. p.86

[9] Ibid.p.109

[10] David Hume, Essai sur l’entendement humain p.92

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